Je recopie ce texte presque intégralement au cas où le lien viendrait qu'à faire défaut.
Par Alice Chantal Tchandem Kamgang Une interview d'un certain Serge Bouchard sur le traitement des autochtones. Il dit entr'autres que le Canada ne reconnait aucun génocide à l'intérieur des frontières. Cependant il y a eu un génocide documenté des autochtones (les Béothuks) à Terre-Neuve, avant l'adhésion de l'île au reste du Canada, en 1949. Il rejette l'idée répandue d'une Amérique déserte et d'une Europe surpeuplée. Il mentionne que 80% des populations amérindiennes ont péri à cause des microbes apportés par les européens. Ceux qui ont survécu ont été massacrés, surtout par les Espagnols et les Américains : " A good indien is a dead indien.".
Serge Bouchard
Un bon texte au sujet des pensionnats autochtones.
Les pensionnats autochtones au Québec et au Canada anglais: Deux mondes différents… deux histoires différentes.
Après avoir commencé à déposséder les Premières Nations de vastes territoires dès la fin du 18ème siècle, les autorités du Haut-Canada (Ontario) ne tardent pas à procéder à leur assimilation. En vertu de «traités» par lesquels elles acquièrent à vil prix d’immenses étendues, les autorités britanniques doivent pourvoir à l’éducation des enfants autochtones. (Goulet 2016) Apparaissent ainsi dans le Canada anglais dès les années 1830 les premiers pensionnats (Mohawk Institute, Brantford, Ontario, 1831), qui relèveront du gouvernement canadien après la création de la Dominion of Canada en 1867. Le régime des pensionnats autochtones, dont le fonctionnement de la plupart sera assuré par la collaboration de différentes Églises (anglicane, baptiste, catholique, mennonite, méthodiste, presbytérienne et unie) durera jusque dans les années 1990 (Gordon Indian Residential School, Punnichy, Saskatchewan, 1996). Ce sont 139 pensionnats qui ont officiellement été répertoriés par le Canada, dont 10 au Québec, où 4 seulement auront été francophones: Fort George (aujourd’hui Chisasibi, 1930 à 1980, francophone à compter de 1967), Sept-Îles (Malioténam, 1952 à 1971), Amos (Saint-Marc-de-Figuery, 1955 à 1973) et Pointe-Bleue (Mashteuiatsh, 1960 à 1973). Notons que, tout comme Fort George jusqu’en 1967, le La Tuque Indian Residential School qui opéra de 1963 à 1978 était un pensionnat anglican anglophone. Toujours de confession anglicane, il ne s’y donna un enseignement en français que dans ses dernières années d’opération.
Durant une centaine d’années, il n’y eut donc pas de pensionnats autochtones au Québec, son territoire n’ayant pas fait l’objet de traités avec les Premières Nations. La situation change à compter de 1920 lorsque la Loi sur les Indiens rend l’école obligatoire pour tous les enfants de 7 à 15 ans. Les quatre pensionnats catholiques et francophones du Québec s’implantent tardivement et durent peu. Ils sont tous les quatre administrés par les pères oblats de Marie-Immaculée dont le mandat explicite dès 1841 est d’oeuvrer auprès des citoyens les plus pauvres, notamment les Autochtones. Les oblats se présenteront bientôt «comme les seuls derniers défenseurs du mode de vie traditionnel des Indiens». À cet égard, ils seront continuellement en porte-à-faux avec l’administration fédérale canadienne qui, elle, prône l’assimilation pure et simple de tous les Autochtones dans les meilleurs délais. Voyons ce que l’on peut trouver à propos de la mission des oblats dans le récent ouvrage de l’historien Henri Goulet, Histoire des pensionnats indiens catholiques au Québec:
«[…] leur travail se distingue des Églises protestantes qui, de leur côté, sont moins réticentes à l’idée de l’assimilation des Indiens à la société dominante canadienne anglaise, surtout à une époque où le «britannisme» domine dans le Dominion du Canada. Les oblats cherchent plutôt à maintenir une certaine distance entre les Indiens et les Blancs. Ils considèrent que le contact entre les deux civilisations est néfaste pour les Indiens, d’où leur insistance pour obtenir des écoles et des hôpitaux confessionnels séparés. Les pères missionnaires doivent apprendre les langues indiennes, ils doivent pouvoir transmettre leurs croyances religieuses dans les langues autochtones et, dans la mesure du possible, produire des manuels d’instruction dans leurs langues.
Ainsi, on peut formuler l’hypothèse que les oblats, dans une moindre mesure que les Églises protestantes et anglophones, se montrent toujours plus réticents au projet d’assimilation des Indiens à la culture dominante tel que l’envisage le département des Affaires indiennes.
Nous laisserons donc à l’Indien l’usage de sa langue maternelle; nous l’encouragerons à s’en servir. C’est un principe de droit naturel. C’est aussi une force non négligeable pour le missionnaire qui sait s’en servir, pour l’éducation.» (Goulet 2016)
Par contraste, comment s'y est pris le régime d'assimilation au Canada anglais? Il s'est agi simplement de tuer l'Indien au coeur de l'enfant (to «kill the Indian in the child», expression empruntée par l’administration canadienne à un officier militaire étatsunien). Voyons comment s’exprimait encore en 1907 le chef des missions de la Methodist Mission Society de l’Église méthodiste du Manitoba: «Cette race misérable est vouée à l’extinction, et la main de la Providence intervient afin de confier à des êtres plus méritants ce pays magnifique et fertile.» Par force de loi même, on a donc séparé de leurs parents, tantôt violemment, les jeunes Autochtones, parfois dès l'âge de trois ans. Puis, dans ces pensionnats, on les a empêchés de parler leur langue. On les a empêchés de se référer à leur culture. Ils ont souvent été négligés, même abusés. Ils sont nombreux dans ces pensionnats à avoir subi des sévices physiques, sexuels ou psychologiques. Plusieurs sont morts dans ces pensionnats, certains dont la famille ne connaît même pas encore aujourd'hui le lieu de sépulture. Ce seraient plus de 4300 enfants qui seraient morts dans les pensionnats autochtones des Canadas depuis 1831. Seulement pour les années 1867 à 1996, le rapport déposé en décembre 2015 par la Commission de vérité et de réconciliation du Canada fait état de 3125 enfants – 3289 depuis la découverte en mai 2021 de 215 dépouilles d’enfants sur le site de l’ancien pensionnat autochtone de Kamloops (1890-1977) en Colombie-Britannique, plutôt que les 51 qui y étaient déjà attribués – qui sont morts de tuberculose, de malnutrition et d’autres maladies résultant de conditions de vie pitoyables… dont 38 (trente-huit) dans les dix pensionnats (francophones et anglophones) du Québec.
C'est ainsi que ces institutions britanniques puis canadiAn, dûment établies par une loi fédérale, ont décimé les familles autochtones du Canada et ont procédé à leur génocide culturel (ethnocide), selon l’accusation même, en 2015, de la juge en chef de la Cour suprême du Canada, Beverly McLachlin.
René Ricard
Comme je le mentionne plus haut, tous les peuples ont commis des crimes sous une forme ou une autre. S'excuser nous donne peut-être bonne conscience mais ne change pas le passé ni ce que nous sommes. Quand un indien nous regarde je me demande ce qu'il voit.
Chez les indiens que j'ai connus, ou plutôt que j'ai côtoyés, on pouvait percevoir dans leurs yeux, dans leur expression les séquelles de leur passé. Je parle du syndrome du colonisé: le regard fuyant, la tête inclinée, la démarche lourde. De nos jours ils sortent de cette torpeur pour s'affirmer et revendiquer. Mais les cicatrices, trop profondes, ne peuvent être ignorées. L'enseignement reste gravé. Chez moi par exemple, même si j'essaie d'annuler mes préjugés, un indien reste un indien, j'ai du mal à lui faire confiance. Ceci démontre la force destructrice que peut répandre l'éducation par les préjugés qu'elle incruste dans l'esprit des jeunes. Les conséquences de nos crimes vont venir nous harceler tout ou tard. Les Indiens ne vont pas se satisfaire d'excuses.
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